The day we first met ++ Evak

Evak

The day we first met

Je me traîne entre les couloirs, c'est l'heure du repas mais je n'ai pas tant faim que ça. Tout dépend de mon humeur et j'avoue que là, elle n'est pas forcément au beau fixe. Je m'ennuie dans ce lycée, j'espère juste terminer vite cette année. Longue année d'ailleurs. Je sais qu'une fois dans le restaurant scolaire, je vais bien trouver quelqu'un avec qui manger, des camarades de classe, un ou deux potes fait rapidement entre deux cours... Je finis souvent par être populaire sans le vouloir, peut-être parce que je suis bizarre... Tout est bizarre à Vancouver, non ?

Un professeur me fait remarquer que l'on ne fume pas dans l'enceinte du lycée et je lui réponds que ma cigarette, bien vissée derrière mon oreille, est dans la légalité là où elle est. Je m'éloigne vite, je ne veux pas de problème. Au final, je me prends un petit plateau : sandwich, pomme et eau ; et je vais m'asseoir à une table. Je discute distraitement, regarde autour de moi, mes longues jambes surélevées par mes pieds croisés sur une table. Encore un truc que les surveillants n'aiment pas me voir faire...

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J'arrive à la cafétéria avec quelques camarades de classe à mes côtés. Ils parlent de filles et moi? Bah moi je cherche distraitement quoi mettre dans mon plateau. Disons que ...Le sujet des filles ne m'intéresse pas tant que ça. Surtout ces temps-ci. J'ai bien une copine mais encore, je ne sais pas. Quelque chose doit clocher en moi car je me sens inconfortable à chaque fois qu'elle s'approche un peu trop près de ma ceinture. J'ai du mal à me laisser aller avec elle, c'est dingue. J'en ai jamais parlé à personne car je me dis que justement, c'est temporaire. Que ça va changer. Que je dois juste être un peu stressé avec les examens etc ...Bref.

Je met un sandwich, une pomme, une soupe et un jus d'orange dans mon plateau, paie la dame et suit mes amis à une table où je prend place. Je commence à enlever le papier d'emballage de mon sandwich quand je remarque un gars au loin. Ce. Gars. Le mec le plus bizzare du lycée, apparemment. Jusqu'à présent, j'avais seulement entendu parlé de lui ...mais jamais vue de mes propres yeux. Il a cet air rebelle ...Un peu prétentieux? J'sais pas. Il a l'air détaché mais en même temps ...J'sais pas. Je l'observe m'observer jusqu'à ce que cela devienne trop intense et que je baisse mon regard sur mon sandwich qui m'a l'air infecte.  Malgré tout, je mord dedans et dès que le pain touche à ma langue, je plisse le nez. Ew. Orgueilleux un peu, je fini par avaler et, sans croiser à nouveau son regard, je regarde directement un de mes amis discuter de sa propre copine.

N'ayant rien à dire vraiment, je coupe sa parole en demandant «Ouais...? Um ...Vous connaissez ce mec?» puis leur montre du regard. Ils me parlent un peu de lui. Me disant à quel point il semblait cool mais étrange à la fois. Le mec qui peut foutre le bordel partout mais qu'on admire peu importe la raison. Je hoche okay et continu à l'observer. Cette fois, avec un peu moins de timidité. Il m'a l'air tellement inaccessible ...mais quelque chose en moi me guide vers lui et je n'ai aucune idée pourquoi. Vraiment aucune. Il me fascine juste ...énormément et je ne sais absolument pas pourquoi. J'espère secrètement qu'il va finir par se lever et venir me voir ...mais ça impliquerait qu'on se parle ...et suis-je vraiment prêt pour ça? J'ai un peu chaud ...C'est normal???

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Mon regard accroche celui de ce garçon et je m'arrête. Je n'ai pas touché à mon plateau depuis tout à l'heure, quand je dis que je n'ai pas faim... Je ne sais pas pourquoi il me regarde comme ça, est-ce que je l'intéresse ? Je crois que c'est un dernier année, tout comme moi. S'installe un petit jeu entre nous que je gagne bien vite. Il finit par lâcher sa prise et j'ai un petit sourire. Je détourne mon attention vers un de mes camarades et lui réponds distraitement, avant de reporter mon regard sur cet autre élève.

J'ai l'impression qu'ils parlent de moi parce que tour à tour, ses amis me regardent ou me désignent du menton. Je me demande ce qu'ils disent, je n'aime pas ça. Qu'on me juge sans me connaître. Même si je laisse rarement des personnes s'approcher assez pour le faire. Je croque dans ma pomme, c'est le seul aliment que je vais avaler à part l'eau. Je finis par donner mon sandwich à quelqu'un d'autre et me lève de ma place, plateau vide en main. Je passe à côté de ce garçon et lui jette un regard tout en posant mon plateau, puis m'en vais fumer une clope dehors. Dans la cour, les gens commencent à s'installer en attendant la reprise des études. Ils en profitent surtout pour fumer, tout comme je le fais. Je guette la porte, voir si ce garçon en sortira. On ne sait jamais.

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Je rêve ou il joue avec moi, là??? Quand je le vois se relever, je me redresse un peu. Mon coeur se met à battre à chamade et je ne sais même pas pourquoi d'ailleurs. Il ne quitte pas mon regard ...que je soutiens d'ailleurs jusqu'à ce qu'il passe à côté de moi et sorte de la cafétéria. Je dois avoir l'air choqué car un de mes amis me donne un coup de coude dans les côtes en me disant «Eh Uh? Je t'ai parlé! ...T'en pense quoi? Tu viendrais?» et moi de dire sans trop savoir «Uh? uh ...Euh ...Ouais ouais ...» Avant de me relever, prendre mon plateau et partir à mon tour en déposant mon plateau sur l'étagère.

En sortant, je le cherche subtilement du regard mais il est déjà bien loin car je le trouve nul part. La journée continue sans embûche ni signe de vie de sa personne. C'est long et pénible. La cloche sonne enfin. Je met mes choses dans mon sac et sort pour vite rattraper le bus. Mon esprit est complètement ailleurs. Je réfléchi encore à ce petit jeu que j'ai partagé avec lui. Ça voulait dire quoi? ...Est-ce que ça voulait dire au moins quelque chose ou j'hallucine complètement? Je me tiens à la barre. Le regard tourné vers le sol en fixant un point vide. Je n'ai conscience de rien. Je suis simplement dans mes songes et mes pensées ...Là où je me sens le mieux, parfois.

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Ma déception occupe le reste de la journée de cours mais avec tous les messages de Jane ou de ma mère, je finis très vite par oublier l'épisode de la cantine. La capuche relevée sur ma tête, je finis de fumer ma clope et la jette dans la poubelle appropriée avant de monter dans le bus, au dernier moment. Je sens qu'il va pleuvoir et je grimace en avançant dans le petit couloir du véhicule.

Quand j'arrive vers le fond du bus, je crois le reconnaître et j'ai un petit sourire. En le voyant seul, sans les autres mecs de la cantine, j'approche et accroche la barre, ma main au-dessus de la sienne. Il a l'air dans ses pensées, regarde ses pieds et donc, ne me vois pas. Je m'amuse un peu à le détailler du regard de haut en bas, profitant de son instant d'égarement. Puis, j'affiche un sourire et le sors de ses pensées.

"Salut" dis-je simplement, attendant qu'il relève la tête vers moi pour me regarder. Je suis un peu plus grand que lui, ou disons qu'il est plus petit que ce que je pensais, au restaurant de l'école. Je ne le quitte pas des yeux, comme lors de notre petit jeu. Je veux voir sa réaction quand il va se rendre compte que, même si ce n'est pas fait exprès, nous nous retrouvons encore dans le même lieu. J'y peux rien, il m'amuse. Il est... mignon. Il illumine un peu ma journée, étrangement.

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.J'ai cette scène qui tourne constamment en boucle dans ma tête. J'y pense et repense. Son regard, sa présence ...Sa prestance. Pourquoi j'y pense autant!? mais j'y peux rien. Son image est incapable de quitter mon esprit même si j'essaie de penser à autre chose... Je retourne toujours à lui. Tellement que je suis perdu dans mes pensées, je ne sens pas qu'une personne m'observe depuis un petit moment déjà. Ce n'est que lorsque j'entends sa voix que je sursaute en relevant mon regard.

Aussitôt, mes yeux s'élargissent et je dis «....Hey...» avant de baisser à nouveau mon regard en me replaçant un peu mieux. Droit. Non mais je rêve ou c'est lui? Je le regarde à nouveau quelques secondes et mes joues s'empourprent. Ouais, c'est bien lui. Oh mon dieu. J'avale difficilement et relève encore mon regard pour l'observer quelques secondes et lui faire un mini sourire avant de retourner ma vision ailleurs. Il continu de me regarder, je le sais! mais quoi dire??? On ne se connait pas! Il ne me connait pas! et d'ailleurs, pourquoi il est venu me saluer? Dans quel but? Voyant qu'il ne dit toujours rien, je deviens hyper nerveux intérieurement et décide de me racler la gorge avant d'ajouter «...Je ne t'ai jamais vu dans le bus ...» Ça m'étonnerait que ce soit la première fois que je le vois. Habituellement, je suis un bon observateur ...Lui, je l'aurais remarqué directement.

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Je suis ravi par sa réaction, celle que j'attendais avec impatience. Il a l'air surpris de me voir là, en même temps on ne s'est jamais croisé à part ce midi. Je remarque qu'il se redresse un peu et évite longtemps mon regard. Il a un petit sourire tout aussi mignon que son petit nez et je ressens bien sa gêne. Je me demande si c'est moi qui la provoque personnellement ou c'est simplement le fait de parler à quelqu'un d'autre d'inconnu qui le met dans cet état. Je ne dis rien pour ne pas aggraver les choses et continue de le fixer.

"Je rentre chez moi à vélo normalement. Pas aujourd'hui." Je souris un peu et le fixe toujours, amusé par sa façon d'agir. Il n'y a pas grand chose à dire, on ne se connaît pas et je ne vais pas lui demander ce qu'il porte comme sous-vêtement ! Finalement, je décide de faire au plus simple.

"Je descends à l'arrêt suivant, et toi ?" Savoir s'il me suit ou non. Je ne l'invite à rien, bien au contraire. Quoique. En tout cas, il pourrait le penser. Pourquoi pas marcher, pour apprendre à se connaître un peu mieux ? Je pense qu'on pourrait s'entendre, lui et moi.
Le bus finit par s'arrêter à l'arrêt suivant et, après avoir fait un petit signe des sourcils à... je ne sais même pas son nom... je descends les marches.

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Je le regarde. Il me regarde. On se regarde. Oh mon dieu ...Pourquoi il me fixe autant? C'est quoi son problème? ...Ou... C'est mon problème? J'ai quelque chose au visage? Soudainement inquiet, je me regarde dans la glace du bus et passe ma main sur ma bouche subtilement. Ouf, non c'est bon. Je n'ai rien. Confus, je le regarde donc à nouveau quand il m'annonce qu'il prend habituellement son vélo ...mais pas aujourd'hui. Pourquoi pas? D'autant plus confus, je lui lance «Ça n'aurait pas été plus vite en vélo...?» sans trop connaître ses intentions. Son sourire, par contre. Oh mon dieu. Mon coeur se met à palpiter plus vite et je deviens subitement un peu plus nerveux. Qu'est-ce qui m'arrive, merde!?

Quand il me dit qu'il descend à la prochaine, je hoche okay et regarde ailleurs quelques secondes. Attend mais ...Est-ce que je rêve ou c'était une subtile invitation? Confus, je réfléchi un peu trop avant de répondre et le voit descendre. Sans trop y penser, je descend aussi en le suivant ...Même si je suis assez loin de mon arrêt habituel. Pourquoi j'ai fait ça? J'en ai aucune espèce d'idée, mais je l'ai fait! Je le regarde alors et met mes mains dans mes poches. Il commence à faire un peu froid dehors et j'envie son capuchon. Il a l'air confortable. Haussant les épaules, je ne sais quoi dire d'autre. Déjà, c'est bien que je sois débarqué, non? Je ne sais pas si il va me laisser en plan là ...mais j'espère qu'il a une idée derrière la tête car ...Même si je suis assez à l'aise de marcher seul vers chez moi, j'aimerais bien être accompagné, pour une fois.

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Le souci c'est que mon vélo, je ne l'ai pas présentement. Je ne l'ai pas pris ce matin, pour cause de pneu crevé. C'est la vie, c'est comme ça. Je lui fais donc un petit signe et descends du bus. Je constate qu'il me suit et ça me fait doucement sourire. On ne connaît même pas nos patronymes respectifs et il a pourtant l'air de me faire confiance. Je ne suis pas non plus un délinquant...

On marche un peu côte à côte pendant quelques minutes, qui paraissent pour moi des heures. Je le regarde de temps en temps, il ne dit rien et semble avoir froid. C'est vrai que le temps s'est rafraîchit. Je sors mon paquet de cigarettes et le lui tends pour qu'il en prenne une. Je ne sais pas s'il fume mais au moins j'aurais fait un effort social.

"Au fait, moi c'est Even." Dis-je pour débuter un semblant de conversation. Bien sûr, je m'attends à ce qu'il me donne son prénom à son tour et je ne le quitte pas des yeux. Il pourrait y avoir un poteau face à moi que je me le prendrais en pleine figure ! Je remarque qu'il est très coincé avec moi, comme si je le gênais. Est-il possible qu'il soit au courant pour moi ? Que l'info sur ma condition de santé ait fuité ? J'espère que non. Pour me rassurer, j'allume ma clope et tire une longue bouffée qui apporte un peu de chaleur et de détente à mon organisme.

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Je ne sais pas trop pourquoi mais je le suis. Mains dans les poches, côte à côte nous marchons ensemble. Il marche bien, en fait. Pas trop vite ...pas trop lent. Juste à la bonne cadence. J'aurais pu croire le contraire avec ses grandes jambes, mais non. C'est agréable. Mon regard se perd dans le paysage alors que je reste là sans rien dire. Je ne sais pas de quoi parler, en fait. J'ai l'impression de donner l'impression d'être un anti-sicoal alors que c'est faux. Je ne sais pas trop pourquoi je perd ma langue, à ses côtés. C'est grave, à bien y penser! Mes épaules sont relevés un peu afin de me garder au chaud, même si ça ne change rien au bout du compte, j'ai toujours froid.

Lorsque je le vois sortir un paquet de cigarette en me le tendant, je plisse mon nez et hoche vivement non en disant «Non merci... » avant d'esquisser un faible sourire en coin. Pinçant mes lèvres, je repose mon regard au sol en marchant et dit «...et moi Isak ...» avant de relever à nouveau mon regard pour constater qu'il ne m'a pas lâché des yeux depuis le paquet de clopes. Je cligne, surpris et rougit légèrement. Il s'allume alors sa cigarette et en tire une bonne bouffée. C'est étrange mais à ce moment, il me fait beaucoup penser à James Dean ...et j'ai toujours apprécié cet acteur.

Fronçant des sourcils, j'essaie de trouver un truc à dire et le seul truc que je sors est «Tu habites loin?» pour meubler la conversation ...Si conversation il y avait. Il ne doit pas habiter très loin j'imagine, vu qu'il a débarqué du bus ...mais à bien y réfléchir, ça fait déjà quelques minutes que nous marchons ainsi. J'avale ma timidité et ajoute «...J'habite à environs dix minutes à pieds d'ici ...Si ça se trouve, on est peut-être voisin ...» et rit un peu avant de me facepalmer intérieurement. Non mais pourquoi j'ai dit ça? Qu'est-ce qu'il m'a prit? J'ai l'impression d'agir comme si je voulais qu'on drague ...C'est étrange!